Brutalité et permissivité: deux tendances à oublier
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Brutalité et permissivité: deux tendances à oublier
Texte publié dans le magazine "Molosses News" n°28 de septembre/octobre 2003.
(Toutes les infos et les conseils donnés dans cet article sont valables avec n'importe quelle catégorie de races de chien)
Brutalité et permissivité: deux tendances à oublier
Comprendre son chien c’est bien difficile, c’est ainsi que certains prennent des raccourcis…
- Il y a ceux qui «savent» qu’un molosse… il n’y a qu’à bien le dresser !.
- À l’opposé, horrifiés par les précédents, il y a ceux qui estiment qu’en le choyant comme un enfant, l’animal sera attaché et reconnaissant.
Et puis, il y a ceux qui ont compris que vivre en harmonie avec un molosse n’était pas le traiter comme on traitait les enfants au 19è siècle (en les dressant !) ni le traiter comme un enfant d’après mai 68 (en étant très permissif !)
Régis et Lydie faisaient partie de la 1è catégorie:
Ils ont fait les frais de la croyance selon laquelle «un molosse : il n’y a qu’à bien le dresser!»
Théo leur Rottweiler, était presque un modèle d’obéissance aux séances du club d’éducation.
Assis, couché, pas bouger, la marche en laisse « nickel » me précise Régis, pas peu fier de ces performances durement acquises.
«Bon, le rappel n’est pas encore vraiment impeccable, mais surtout, Lydie et moi ne comprenons pas pourquoi Théo nous obéit si mal à la maison. Il est très gentil et pourtant, il lui arrive parfois de nous grogner dessus! je l’ai déjà corrigé, il a recommencé, et maintenant Lydie commence à avoir peur de lui !»
Cette escalade d’incompréhensions, risquait de mener Régis et Lydie tout droit à la rupture de leur relation avec Théo.
Au premier entretien il est apparu clairement que ce jeune couple comme beaucoup, avait amalgamé obéissance, hiérarchie, soumission, autorité. Régis et Lydie avaient cru que seul un dressage avec apprentissage aux ordres assis, couché, pas bouger etc.. au club d’éducation canine, aurait suffit à leur assurer un bon ascendant sur Théo.
Si ces apprentissages loin d’être inutiles ne sont pas transposables dans la vie quotidienne à la maison, c’est à dire si le molosse n’obéit bien que dans le contexte du club et beaucoup moins bien, voire plus du tout, une fois sorti, c’est qu’en réalité le chien ne reconnaît tout simplement pas l’autorité de ses maîtres.
«Alors pourquoi ne la reconnaît-il pas ?» me demande Régis embarrassé, «parce qu’enfin Théo sait très bien qui est le maître ici ! si je me fâche, il n’y a qu’à le voir s’aplatir !!». «Oui, reprend Lydie, mais depuis quelque temps, tu ne peux plus le plaquer au sol en l’attrapant par la peau du cou comme tu le faisais…parce que maintenant il grogne vraiment d’un air mauvais !!»
Régis et Lydie attendaient du dressage ce qu’il ne peut pas apporter.
Des règles de vie
Ils ne savaient pas qu’en premier lieu, ce sont des règles de vie en groupe, imposées clairement et maintenues avec constance par les maîtres, qui mettent le molosse en position de reconnaître leur autorité.
Ils n’avaient pas vu non plus la nécessité de mieux s’informer des codes sociaux canins pour comprendre les réactions de leur chien. Ni celle d'approfondir leur connaissance des codes de communication canine pour mieux interpréter les « messages » des comportements de Théo, et pouvoir lui « répondre » de manière pertinente.
Résultat pour le molosse, à la maison pas de repères, pas de ligne de conduite dictée par ses maîtres, ce qui était permis ou non était imprécis ou changeant.
Le molosse se débrouillait comme il pouvait entre Régis souvent passif : « je ne peux pas tout lui interdire ! déjà que je ne suis pas là de toute la journée !» ou soudain répressif quand : «Théo dépasse les bornes ! il est vautré dans l’entrée, je passe près de lui pour aller vers ma femme, et il me grogne dessus!!»
Lydie elle, démissionnait : «moi je ne lui commande rien, parce que je sais que Théo ne le fera pas !!». En ajoutant : «j’ai tout essayé, maintenant le plus souvent dans la journée, je ne fais plus attention à lui, sinon il me regarde d’un drôle d’air !»
En quelques entretiens Régis et Lydie ont pu «reprendre les rênes».
Ils ont veillé à prendre le contrôle de l’ensemble de leurs activités en mettant en place quelques règles de vie élémentaires et claires pour un chien.
Manger avant Théo, et ne surtout rien lui donner à table au cours des repas.
Lui assigner « sa » place à lui et limiter l’espace qu’il pouvait occuper (certaines pièces et places qu’il avait choisies étant désormais interdites)
Ne pas le laisser s’immiscer ni s’interposer dans les occupations de ses maîtres (ce dont Théo ne se privait pas ! sans cesse à quêter attentions, caresses, jeux ou sorties, à s’asseoir sur les pieds, se frotter ou s’appuyer sur les jambes, aboyer pendant les conversations téléphoniques, etc…)
Ces quelques exemples d’instantanés de vie ayant été détaillés minutieusement, rien ne pouvant être laissé au hasard lors de la réorganisation relationnelle.
Le jeune couple a compris que ces règles de vie ne pouvaient pas être suivies partiellement, et ce que l’un d’entre eux interdisait à Théo, l’autre ne pouvait pas l’autoriser.
Décider d’imposer ces règles et les maintenir, mettait Régis et Lydie en position d’autorité et devait mener petit à petit Théo à s’y soumettre sans heurts (mais non sans résistance au début !)
Bien sûr ils ont appris que si on laisse simplement un molosse décider lui-même de ce qu’il peut faire à la maison, il vient « rappeler à l’ordre » en grognant (ou pire parfois en mordant) quand vous voulez lui imposer ce qu’il n’a pas lui-même décidé ! ex : passer dans l’entrée pour aller rejoindre votre femme !!
Soumis de son plein gré
Quand nous avons abordé le thème des sanctions, Régis a compris qu’un maître qui recourt à la force avec son chien, peut se dire que son autorité n’est justement pas reconnue par l’animal.
Il a réalisé combien il avait pris de risque d’être mordu par Théo en voulant le maintenir de force en posture de soumission. Des irresponsables sûrs que c’est ainsi que l’on s’affirme comme chef, lui avaient conseillé de corriger ainsi son molosse quand il grognait !
Un chien adopte la posture de soumission normalement et de son propre gré, APRES avoir justement reconnu l’autorité de l’autre.
C’est donc user d’une violence maladroite et peu glorieuse, que de vouloir maintenir un molosse par la force dans cette posture, qui pourrait pousser le chien à se sentir agressé, surenchérir et mordre gravement.
Plusieurs semaines d’efforts ont été nécessaires pour faire perdre à Théo ses vieilles «mauvaises habitudes». Régis et Lydie étaient harassés de devoir se soustraire à toutes les sollicitations du molosse car il n’était pas question de le repousser (et lui porter encore l’attention qu’il voulait). D'autre part, sentant bien que la direction des opérations à la maison lui échappait, Théo aurait pu se retourner contre la main qui le bousculait.
Mais les jeunes maîtres persévérants ont eu raison des résistances de leur compagnon, qui a fini par céder à leur autorité nouvelle.
Théo n’est plus en perte de repères, il obéi même avec souplesse quand on lui demande de se déplacer, il ne cherche plus à commander sans cesse l’attention de chacun, gai mais paisible il ne fait plus peur à Lydie.
Elle sait maintenant qu’elle communique vraiment plus clairement avec son molosse, qui n’ignorera plus les messages qu’elle lui envoie par sa nouvelle manière d’être.
Régis est aux anges, il fait merveille au club d’éducation quand Théo accourt dès le premier rappel. Maintenant que son compagnon le respecte, il constate qu’il n’a plus de difficulté pour le faire obéir facilement. Il a suffit pour cela de réorganiser (en douceur) leur relation.
Finalement ce que Régis pensait obtenir de son molosse en le « dressant » il l’a obtenu en «communiquant».
Alice et Bruno faisaient partie de l’autre catégorie :
Celle de ceux qui croient qu’en le choyant comme un enfant, l’animal sera attaché et reconnaissant.
C’est Souzy, leur chienne Cane corso qui les désespère : « À 2 ans passés notre chienne détruit encore quand rarement nous la laissons seule à la maison. Nous ne savons plus que faire, il nous semble avoir tout essayé…»
Chouchoutée comme un bébé
Avec tous les efforts déjà déployés sur les conseils des uns et des autres, Alice et Bruno étaient parvenus à «limiter les dégâts». Ils avaient organisé leur vie autour de ce qu’ils appellent « le problème de Souzy », c’est à dire sa crainte de la solitude.
Alice travaillant à la maison, elle ne s’absentait donc déjà pas comme Bruno. Pour faire les courses, aller à la banque, chez le coiffeur, etc… soit elle y allait avec Souzy (ce qui n’est pas toujours possible) soit elle attendait que Bruno rentre ! ou vraiment prise de court et pour une brève absence, elle laissait Souzy enfermée dans sa boîte de transport (remède contre les destructions mais pas contre les aboiements que cela déclenche !) les substances apaisantes diffusées dans la maison ne semblant pas opérantes…
Quand le couple désirait s’offrir une soirée de distraction chez des amis, restaurant, spectacle ou autre, ils faisaient appel à une garde à domicile.
La liste serait encore longue de toutes les adaptations dont ils ont su faire preuve !! Leur complaisante sollicitude était touchante, leur affection pour Souzy évidente, mais Alice et Bruno n’avaient pas réalisé jusque là, qu’ils ne s’attaquaient pas à la racine du « problème de Souzy ».
Ce soin inquiet qu’ils portaient à leur chienne, ne délivrait pas la molosse de son malaise à rester seule.
Ils avaient cherché et mis en place des solutions pratiques, tentant ainsi de préserver Souzy de sa crainte de la solitude, mais sans savoir comment parvenir à l’en guérir.
Si Régis et Lydie proposaient à Théo des règles de vie en groupe imprécises et changeantes, Alice et Bruno eux, n’avaient pas vu la nécessité d’en instaurer avec Souzy.
Ils offraient, leur semblait-il, le meilleur à leur chienne comme ils auraient fait à un enfant, sans réaliser qu’ils ne tenaient pas compte de sa spécificité canine.
A l’examen de leur situation relationnelle avec la molosse, il apparaissait que celle-ci exerçait sur ses maîtres une véritable tyrannie. Elle détruisait murs, portes et autres choses à sa portée dès qu’Alice et Bruno tournaient les talons, mais ça n’était pas tout ! il lui arrivait aussi de souiller la maison de ses déjections...! ce qui faisait qu’on l’enfermait dans sa boîte de transport (avec difficulté d’ailleurs : résistance et grognements) pour finalement l’entendre aboyer nerveusement !!…
Un état de dépendance entretenu
Quand elle devait rester seule, Souzy éprouvait et exprimait une détresse émotive intense, une frustration aussi et la colère qui allait avec.
Il fallait qu’Alice et Bruno réalisent qu’ils avaient maintenu Souzy dans un état de dépendance qui ne lui permettait pas aujourd’hui, de savoir rester un peu seule. Et qu’en même temps, ne cherchant pas à faire preuve d’autorité avec elle, ils en avaient fait une chienne insoumise.
Quand Souzy voyait ses maîtres partir, à la fois inquiète, frustrée et en colère, elle cherchait à soulager sa tension en la redirigeant en une action de substitution : ronger, gratter murs, portes ou meubles à proximité, et/ou en urinant, déféquant, et/ou aboyant pour « rappeler à l’ordre » ses maîtres qui n’en «faisaient qu’à leur tête!!»
Alice et Bruno ont dû travailler à réorganiser leur relation avec leur molosse, ainsi qu’à lui apprendre le détachement.
Il leur a fallu intégrer que l’autorité qui n’était pas brutalité, était nécessaire dans la relation avec un chien. Que c’était plutôt l’attitude de personnes déterminées, soucieuses du confort et de la spécificité de l’animal, qui dictant des règles de conduites justes et pondérées, reçoivent en retour sa confiance et son obéissance.
Souzy ne s’est pas soumise sans résistance aux règles de vie nouvelle, imposées par ses maîtres. Elle avait tant de privilèges que certains on été durs à lâcher !
Au milieu de ces nouveaux repères, son attachement à ses maîtres est devenu moins anxieux, elle a acquis plus d’autonomie et a pu apprendre petit à petit que les départs de ses maîtres toujours suivis de retours, pouvaient être vécus sans détresse et sans frustration.
C’est ainsi en cherchant à mieux connaître et comprendre leur chien, que l’un et l’autre couple sont parvenus à d’harmonieuses relations, basées sur plus de respect pour leur animal.
Danièle Mirat
(Toutes les infos et les conseils donnés dans cet article sont valables avec n'importe quelle catégorie de races de chien)
Brutalité et permissivité: deux tendances à oublier
Comprendre son chien c’est bien difficile, c’est ainsi que certains prennent des raccourcis…
- Il y a ceux qui «savent» qu’un molosse… il n’y a qu’à bien le dresser !.
- À l’opposé, horrifiés par les précédents, il y a ceux qui estiment qu’en le choyant comme un enfant, l’animal sera attaché et reconnaissant.
Et puis, il y a ceux qui ont compris que vivre en harmonie avec un molosse n’était pas le traiter comme on traitait les enfants au 19è siècle (en les dressant !) ni le traiter comme un enfant d’après mai 68 (en étant très permissif !)
Régis et Lydie faisaient partie de la 1è catégorie:
Ils ont fait les frais de la croyance selon laquelle «un molosse : il n’y a qu’à bien le dresser!»
Théo leur Rottweiler, était presque un modèle d’obéissance aux séances du club d’éducation.
Assis, couché, pas bouger, la marche en laisse « nickel » me précise Régis, pas peu fier de ces performances durement acquises.
«Bon, le rappel n’est pas encore vraiment impeccable, mais surtout, Lydie et moi ne comprenons pas pourquoi Théo nous obéit si mal à la maison. Il est très gentil et pourtant, il lui arrive parfois de nous grogner dessus! je l’ai déjà corrigé, il a recommencé, et maintenant Lydie commence à avoir peur de lui !»
Cette escalade d’incompréhensions, risquait de mener Régis et Lydie tout droit à la rupture de leur relation avec Théo.
Au premier entretien il est apparu clairement que ce jeune couple comme beaucoup, avait amalgamé obéissance, hiérarchie, soumission, autorité. Régis et Lydie avaient cru que seul un dressage avec apprentissage aux ordres assis, couché, pas bouger etc.. au club d’éducation canine, aurait suffit à leur assurer un bon ascendant sur Théo.
Si ces apprentissages loin d’être inutiles ne sont pas transposables dans la vie quotidienne à la maison, c’est à dire si le molosse n’obéit bien que dans le contexte du club et beaucoup moins bien, voire plus du tout, une fois sorti, c’est qu’en réalité le chien ne reconnaît tout simplement pas l’autorité de ses maîtres.
«Alors pourquoi ne la reconnaît-il pas ?» me demande Régis embarrassé, «parce qu’enfin Théo sait très bien qui est le maître ici ! si je me fâche, il n’y a qu’à le voir s’aplatir !!». «Oui, reprend Lydie, mais depuis quelque temps, tu ne peux plus le plaquer au sol en l’attrapant par la peau du cou comme tu le faisais…parce que maintenant il grogne vraiment d’un air mauvais !!»
Régis et Lydie attendaient du dressage ce qu’il ne peut pas apporter.
Des règles de vie
Ils ne savaient pas qu’en premier lieu, ce sont des règles de vie en groupe, imposées clairement et maintenues avec constance par les maîtres, qui mettent le molosse en position de reconnaître leur autorité.
Ils n’avaient pas vu non plus la nécessité de mieux s’informer des codes sociaux canins pour comprendre les réactions de leur chien. Ni celle d'approfondir leur connaissance des codes de communication canine pour mieux interpréter les « messages » des comportements de Théo, et pouvoir lui « répondre » de manière pertinente.
Résultat pour le molosse, à la maison pas de repères, pas de ligne de conduite dictée par ses maîtres, ce qui était permis ou non était imprécis ou changeant.
Le molosse se débrouillait comme il pouvait entre Régis souvent passif : « je ne peux pas tout lui interdire ! déjà que je ne suis pas là de toute la journée !» ou soudain répressif quand : «Théo dépasse les bornes ! il est vautré dans l’entrée, je passe près de lui pour aller vers ma femme, et il me grogne dessus!!»
Lydie elle, démissionnait : «moi je ne lui commande rien, parce que je sais que Théo ne le fera pas !!». En ajoutant : «j’ai tout essayé, maintenant le plus souvent dans la journée, je ne fais plus attention à lui, sinon il me regarde d’un drôle d’air !»
En quelques entretiens Régis et Lydie ont pu «reprendre les rênes».
Ils ont veillé à prendre le contrôle de l’ensemble de leurs activités en mettant en place quelques règles de vie élémentaires et claires pour un chien.
Manger avant Théo, et ne surtout rien lui donner à table au cours des repas.
Lui assigner « sa » place à lui et limiter l’espace qu’il pouvait occuper (certaines pièces et places qu’il avait choisies étant désormais interdites)
Ne pas le laisser s’immiscer ni s’interposer dans les occupations de ses maîtres (ce dont Théo ne se privait pas ! sans cesse à quêter attentions, caresses, jeux ou sorties, à s’asseoir sur les pieds, se frotter ou s’appuyer sur les jambes, aboyer pendant les conversations téléphoniques, etc…)
Ces quelques exemples d’instantanés de vie ayant été détaillés minutieusement, rien ne pouvant être laissé au hasard lors de la réorganisation relationnelle.
Le jeune couple a compris que ces règles de vie ne pouvaient pas être suivies partiellement, et ce que l’un d’entre eux interdisait à Théo, l’autre ne pouvait pas l’autoriser.
Décider d’imposer ces règles et les maintenir, mettait Régis et Lydie en position d’autorité et devait mener petit à petit Théo à s’y soumettre sans heurts (mais non sans résistance au début !)
Bien sûr ils ont appris que si on laisse simplement un molosse décider lui-même de ce qu’il peut faire à la maison, il vient « rappeler à l’ordre » en grognant (ou pire parfois en mordant) quand vous voulez lui imposer ce qu’il n’a pas lui-même décidé ! ex : passer dans l’entrée pour aller rejoindre votre femme !!
Soumis de son plein gré
Quand nous avons abordé le thème des sanctions, Régis a compris qu’un maître qui recourt à la force avec son chien, peut se dire que son autorité n’est justement pas reconnue par l’animal.
Il a réalisé combien il avait pris de risque d’être mordu par Théo en voulant le maintenir de force en posture de soumission. Des irresponsables sûrs que c’est ainsi que l’on s’affirme comme chef, lui avaient conseillé de corriger ainsi son molosse quand il grognait !
Un chien adopte la posture de soumission normalement et de son propre gré, APRES avoir justement reconnu l’autorité de l’autre.
C’est donc user d’une violence maladroite et peu glorieuse, que de vouloir maintenir un molosse par la force dans cette posture, qui pourrait pousser le chien à se sentir agressé, surenchérir et mordre gravement.
Plusieurs semaines d’efforts ont été nécessaires pour faire perdre à Théo ses vieilles «mauvaises habitudes». Régis et Lydie étaient harassés de devoir se soustraire à toutes les sollicitations du molosse car il n’était pas question de le repousser (et lui porter encore l’attention qu’il voulait). D'autre part, sentant bien que la direction des opérations à la maison lui échappait, Théo aurait pu se retourner contre la main qui le bousculait.
Mais les jeunes maîtres persévérants ont eu raison des résistances de leur compagnon, qui a fini par céder à leur autorité nouvelle.
Théo n’est plus en perte de repères, il obéi même avec souplesse quand on lui demande de se déplacer, il ne cherche plus à commander sans cesse l’attention de chacun, gai mais paisible il ne fait plus peur à Lydie.
Elle sait maintenant qu’elle communique vraiment plus clairement avec son molosse, qui n’ignorera plus les messages qu’elle lui envoie par sa nouvelle manière d’être.
Régis est aux anges, il fait merveille au club d’éducation quand Théo accourt dès le premier rappel. Maintenant que son compagnon le respecte, il constate qu’il n’a plus de difficulté pour le faire obéir facilement. Il a suffit pour cela de réorganiser (en douceur) leur relation.
Finalement ce que Régis pensait obtenir de son molosse en le « dressant » il l’a obtenu en «communiquant».
Alice et Bruno faisaient partie de l’autre catégorie :
Celle de ceux qui croient qu’en le choyant comme un enfant, l’animal sera attaché et reconnaissant.
C’est Souzy, leur chienne Cane corso qui les désespère : « À 2 ans passés notre chienne détruit encore quand rarement nous la laissons seule à la maison. Nous ne savons plus que faire, il nous semble avoir tout essayé…»
Chouchoutée comme un bébé
Avec tous les efforts déjà déployés sur les conseils des uns et des autres, Alice et Bruno étaient parvenus à «limiter les dégâts». Ils avaient organisé leur vie autour de ce qu’ils appellent « le problème de Souzy », c’est à dire sa crainte de la solitude.
Alice travaillant à la maison, elle ne s’absentait donc déjà pas comme Bruno. Pour faire les courses, aller à la banque, chez le coiffeur, etc… soit elle y allait avec Souzy (ce qui n’est pas toujours possible) soit elle attendait que Bruno rentre ! ou vraiment prise de court et pour une brève absence, elle laissait Souzy enfermée dans sa boîte de transport (remède contre les destructions mais pas contre les aboiements que cela déclenche !) les substances apaisantes diffusées dans la maison ne semblant pas opérantes…
Quand le couple désirait s’offrir une soirée de distraction chez des amis, restaurant, spectacle ou autre, ils faisaient appel à une garde à domicile.
La liste serait encore longue de toutes les adaptations dont ils ont su faire preuve !! Leur complaisante sollicitude était touchante, leur affection pour Souzy évidente, mais Alice et Bruno n’avaient pas réalisé jusque là, qu’ils ne s’attaquaient pas à la racine du « problème de Souzy ».
Ce soin inquiet qu’ils portaient à leur chienne, ne délivrait pas la molosse de son malaise à rester seule.
Ils avaient cherché et mis en place des solutions pratiques, tentant ainsi de préserver Souzy de sa crainte de la solitude, mais sans savoir comment parvenir à l’en guérir.
Si Régis et Lydie proposaient à Théo des règles de vie en groupe imprécises et changeantes, Alice et Bruno eux, n’avaient pas vu la nécessité d’en instaurer avec Souzy.
Ils offraient, leur semblait-il, le meilleur à leur chienne comme ils auraient fait à un enfant, sans réaliser qu’ils ne tenaient pas compte de sa spécificité canine.
A l’examen de leur situation relationnelle avec la molosse, il apparaissait que celle-ci exerçait sur ses maîtres une véritable tyrannie. Elle détruisait murs, portes et autres choses à sa portée dès qu’Alice et Bruno tournaient les talons, mais ça n’était pas tout ! il lui arrivait aussi de souiller la maison de ses déjections...! ce qui faisait qu’on l’enfermait dans sa boîte de transport (avec difficulté d’ailleurs : résistance et grognements) pour finalement l’entendre aboyer nerveusement !!…
Un état de dépendance entretenu
Quand elle devait rester seule, Souzy éprouvait et exprimait une détresse émotive intense, une frustration aussi et la colère qui allait avec.
Il fallait qu’Alice et Bruno réalisent qu’ils avaient maintenu Souzy dans un état de dépendance qui ne lui permettait pas aujourd’hui, de savoir rester un peu seule. Et qu’en même temps, ne cherchant pas à faire preuve d’autorité avec elle, ils en avaient fait une chienne insoumise.
Quand Souzy voyait ses maîtres partir, à la fois inquiète, frustrée et en colère, elle cherchait à soulager sa tension en la redirigeant en une action de substitution : ronger, gratter murs, portes ou meubles à proximité, et/ou en urinant, déféquant, et/ou aboyant pour « rappeler à l’ordre » ses maîtres qui n’en «faisaient qu’à leur tête!!»
Alice et Bruno ont dû travailler à réorganiser leur relation avec leur molosse, ainsi qu’à lui apprendre le détachement.
Il leur a fallu intégrer que l’autorité qui n’était pas brutalité, était nécessaire dans la relation avec un chien. Que c’était plutôt l’attitude de personnes déterminées, soucieuses du confort et de la spécificité de l’animal, qui dictant des règles de conduites justes et pondérées, reçoivent en retour sa confiance et son obéissance.
Souzy ne s’est pas soumise sans résistance aux règles de vie nouvelle, imposées par ses maîtres. Elle avait tant de privilèges que certains on été durs à lâcher !
Au milieu de ces nouveaux repères, son attachement à ses maîtres est devenu moins anxieux, elle a acquis plus d’autonomie et a pu apprendre petit à petit que les départs de ses maîtres toujours suivis de retours, pouvaient être vécus sans détresse et sans frustration.
C’est ainsi en cherchant à mieux connaître et comprendre leur chien, que l’un et l’autre couple sont parvenus à d’harmonieuses relations, basées sur plus de respect pour leur animal.
Danièle Mirat
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